Un livre m'accompagne depuis mes premiers travaux universitaires : "On ne finit pas d'apprendre" le fossé humain à combler par James W.Botkin, Mahdi Elmandjra, Mircea Malitza - Pergamon Press - 1980 - 179 pages. Les auteurs distinguent l'apprentissage conservateur de l'apprentissage innovateur : pour affronter les défis auxquels nous sommes confrontés l'apprentissage conservateur est une hérésie :
"Aujourd'hui, il y a tout lieu de douter que les processus classiques d'apprentissage humain soient encore à la hauteur de leur fonction. En général, les sociétés et les individus ont toujours adopté un style d'apprentissage conservateur (maintenance learning) continu, interrompu par de brèves périodes d'innovation, très souvent provoquées par le choc d'événements extérieurs. L'apprentissage conservateur consiste à acquérir des façons de voir, des méthodes et des règles fixes permettant de faire face à des situations connues qui se reproduisent régulièrement. Il augmente notre aptitude à résoudre des problèmes donnés. C'est le genre d'apprentissage qui est conçu pour entretenir un statu quo ou un mode de vie établi. L'apprentissage conservateur est et restera indispensable au fonctionnement et à la stabilité de toutes les sociétés.
Mais pour la survie à long terme, plus particulièrement aux époques où se produisent des troubles, des changements ou des ruptures avec le passé, un autre type d'apprentissage est encore plus nécessaire. C'est le type d'apprentissage qui peut apporter le changement, le renouveau, la restructuration et la reformulation des problèmes - celui que nous appellerons l'apprentissage innovateur.
Tout au long de l'histoire la formule classique utilisée pour stimuler l'apprentissage innovateur a consisté à compter sur le choc des événements. La pénurie soudaine, le danger, l'adversité, une catastrophe interrompaient le cours de l'apprentissage conservateur et jouaient douloureusement mais efficacement le rôle du maître suprême. Les choses n'ont guère changé et l'humanité continue à attendre des événements et des crises capables de catalyser ou d'imposer ce type primitif d'apprentissage par le choc. Mais la problématique planétaire fait intervenir au moins un risque nouveau : le choc pourrait être fatal. Cette possibilité, si éloignée soit-elle, montre aussi clairement que possible à quoi tient la crise de l'apprentissage classique : non seulement la confiance placée avant tout dans l'apprentissage conservateur bloque la percée de l'apprentissage innovateur, mais encore elle rend l'humanité de plus en plus vulénrable au choc ; et dans les conditions actuelles d'incertitude générale, l'apprentissage par le choc est une formule qui mène droit au désastre."
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