En proposant de s’attaquer au cumul des mandats Martine Aubry fait un pas significatif pour révolutionner la politique française. Voilà une classe (au sens sociologique du terme) qui ne s’applique pas ce qu’elle prône pour les autres classes ! Je veux bien évidemment évoquer la mobilité. Alors que, sur tous les tons, depuis des années et des années, le discours dominant encourage la mobilité professionnelle en changeant au moins trois fois dans sa vie de travail, la classe politique, dans sa grande majorité, fait carrière. Les mandats succèdent aux mandats et, comme un seul ne suffit pas, il est préférable d’en détenir de nombreux ! Sans parler des mandats qui relèvent du suffrage indirect au sein des Etablissements Publics de Coopération Intercommunale. Comment peut-on assumer plusieurs mandats cumulés en faisant autre chose que de l’agitation politicienne ? Personne n’est dupe ! Un travail sérieux, un travail de fond, un travail rigoureux suppose un investissement à plein temps dans la fonction occupée. «Notre pays est l’un des seuls en Europe, où des responsables politiques cumulent plusieurs fonctions électives. Alors que les parlementaires français ont pour 85 % d’entre-eux au moins une autre responsabilité locale, ils ne sont que 16 % en Italie, 15 % en Espagne, 13 % en Grande-Bretagne et 10 % en Allemagne. L’élu n’est pas un employé et son mandat n’est pas un job.» (Source ici )
Paul Quilès ancien ministre de François Mitterrand avance «que le mandat unique est un préalable indispensable à la revalorisation du travail des élus et à la revitalisation du Parti socialiste.» Je suis suffisamment critique envers la classe politique dans son ensemble pour saluer sans réserve la proposition de Martine Aubry. Il est grand temps de révolutionner les pratiques et les comportements politiques. Il n’y a pas d’autres voies pour que les citoyens réinvestissent le champ politique, pour que les citoyens s’impliquent politiquement. Ce qui est une nécessité. Une révolution culturelle de la part des hommes et des femmes politiques s’impose car comme l’écrit si bien Valéry Giscard d’Estaing : « La trajectoire d’un élu politique en France répond à deux lois simples : on se présente à une fonction pour préparer sa candidature à la fonction suivante ; lorsqu’on est élu à la fonctionsupérieure, on conserve la fonction antérieure de manière à éviter qu’un «intrigant» ne vienne reproduire à vos dépens le parcours que vous venez de réussir. D’où l’obsession de cumuler les mandats.» (Valéry Giscard d'Estaing)
Comment ne pas être d'accord avec l'idée qu'il faut tout mettre en œuvre pour lutter contre le cumul des mandats. Cependant je crois que pour y arriver une loi ne suffira pas. Il faut globalement poser la question du statut (aujourd'hui inexistant)de l'élu qui permettait à tout citoyen qui s'engage à disposer d'un temps reconnu pour exercer son mandat et des garanties pour les salariés qui se trouveraient dans l'obligation de suspendre leurs activité professionnelle de la retrouver. Plus globalement est ainsi posé la question du temps citoyen, pas nécessairement légiféré, mais rendu possible par la diminution du temps de travail, une éducation citoyenne dès l'école, et la revalorisation de la notion d'intérêt général.
Rédigé par : Jacques Houdremont | 12/09/2009 à 11:40